Maine – J. Courtney Sullivan
Je dois être la seule, sur toute la blogosphère, à avoir détesté Les débutantes, premier roman de J. Courtney Sullivan, et son féminisme de pacotille. Mais les avis sur son second roman étaient si élogieux que je n’ai pas su résister à la tentation…
Maine nous raconte la vie de la famille Kelleher, par la voix de quatre femmes de trois générations différentes. La première voix est celle d’Alice, la mère, qui fut une mère bien peu maternelle. Aujourd’hui c’est une vieille dame, toujours jolie et élégante, mais qui a tendance à lever le coude pour supporter l’absence de son mari, mort quelques années plus tôt. Elle est à la fois très pieuse et très méchante, ce qui n’incite pas spécialement ses enfants à venir partager sa maison da vacances au bord de l’océan, quelque part dans le Maine. Il y a ensuite sa fille Kathleen, baba cool écolo, ex-alcoolique, qui a mis toute la largeur d’un continent entre elle et sa famille, notamment sa mère qu’elle ne supporte pas. Et elle est, bien sûr, devenue une mère à l’opposé de la sienne : copine, fusionnelle, du genre qu’on appelle une fois par jour et à qui on dit tout. Vient ensuite Ann Marie, la belle-fille, autre figure de mère totalement différente, dans le genre femme parfaite qui-a-tout-sacrifié-à-ses-enfants. Et enfin, Maggy, la petite-fille, qui vient de se faire plaquer par son copain, avant d’avoir pu lui annoncer qu’elle était enceinte et qui se pose, évidemment, un tas de questions sur sa future maternité. A travers ces quatre femmes, l’auteure dresse un portrait composite de la figure maternelle et des relations mère-fille.
Ce que j’en ai pensé ? Ça se lit bien, sans doute parce qu’il n’y a pas de style et que ça parle de choses que l’on a déjà lues mille fois. Ou alors c’est moi qui me lasse des histoires de famille de la middle class américaine. (Je n’ai pas pu m’empêcher de penser à Stewart O’Nan). Il y a toujours un fils qui a perdu son boulot au-grand-désespoir-de-ses-parents, une fille qui divorce en-mettant-en péril-l’avenir-de-ses-enfants, une ex-alcoolique (la divorcée et l’alcoolique sont souvent la même personne), quelqu’un qui fume en cachette (le tabac, c’est mal !), des histoires d’argent et de succession, etc. Sans compter que ces femmes sont toutes à la limite de la caricature, chacune dans son genre (cela dit, les américains sont tellement excessifs qu’il y a peut-être des gens réellement comme ça !) et qu’elles ne sont pas spécialement sympathiques (la plus touchante est finalement Ann Marie dans le genre desperate housewife). Tout ce qui aurait pu être évoqué sur l’évolution de la condition féminine en soixante ans est à peine effleuré. En revanche on croule sous les poncifs : un enfant d’alcoolique finira toujours par boire à son tour, si les enfants ratent leurs vies, c’est forcément la faute des parents, les parents doivent être jugés sur la réussite de leurs enfants, et le plus sublime de tous : la vie de famille, c’est difficile.
Bref, je n’ai pas totalement détesté, mais pas franchement aimé non plus, et je ne suis pas mécontente de l’avoir emprunté à la bibliothèque, ce qui m’évitera de l’abandonner dans un hôtel comme le précédent.
Inutile de vous dire que je me sens un peu seule sur ce coup-là, parce que je n’ai pas trouvé un seul avis négatif sur ce roman : Cuné, Cathulu et Clara ont adoré.
Traduit de l’américain par Camille Lavacourt.
Editions rue Fromentin, 2013 (Livre de Poche, 2014). – 450 p.