Martin Dressler - Steven Millhauser
Ou le roman d'un rêveur américain.
En 1881, New York est encore une ville en devenir, une ville qui sort de terre. C'est là, dans la boutique de cigares de son père, que grandit Martin Dressler. Très jeune, il montre déjà un talent certain pour le commerce et il n'a que quatorze ans quand un client de son père lui propose un job de garçon d'ascenceur dans le prestigieux hôtel Vanderlyn. Martin va tout de suite être fasciné par ce monde en miniature : les clients chics et élégants, l'atmosphère de luxe discret, mais aussi les coulisses qui font de ce lieu une vaste machinerie. Martin va y développer ce don d'empathie qui fait qu'il sait d'emblée ce que le client désire. Il gravit rapidement les échelons jusqu'à devenir secrétaire particulier du directeur. Et il ne tarde pas à lancer sa propre affaire : une boutique d'abord, puis un restaurant, un deuxième, un troisiéme... Son but, n'est pas uniquement de devenir riche, mais de réaliser un rêve, de créer un monde idéal, où tout le monde aurait envie de vivre : Martin est un rêveur.
« Sa vie était une vie en rêve, un intermède, une vie dont il s’éveillerait un jour pour commencer sa vraie vie – même s’il ne savait rien de cette vraie vie. »
Martin Dressler est un de ces batisseurs fous qui ont fait de New York (et de l'Amérique) ce qu'elle est aujourd'hui. A travers lui, c'est tout le rêve américain qui s'incarne, le rêve d'un monde nouveau, d'un monde idéal. Pour une amoureuse de New York comme moi, c'est un bonheur d'assister à la naissance de cette ville et de suivre Martin Dressler dans ses rêves, ses ambitions, ses folies. C'est un de ses américains comme on les aime, à l'origine d'un pays mégalomane et fou qui nous irrite et nous fait rêver. Le roman, d'ailleurs, flirte sans cesse avec le rêve. Mais gare au rêveur... A trop suivre ses rêves, on risque de créer un monde glacé et invivable, sauf à devenir un comédien dans un décor de théâtre. Une allégorie de l'Amérique d'aujourd'hui, qui se serait perdue dans son rêve ?
Merci à Keisha pour le prêt.
Les avis de : Restling - Keisha - Sylire - Solenn - Cuné
Traduit de l’américain par Françoise Cartano.
Le Livre de poche, 2002. – 286 p.