Le vent - Dorothy Scarborough
Dans les années vingt, une jeune orpheline est obligée de quitter sa Virginie natale et verdoyante pour s'installer au Texas. Après la mort de sa mère, Letty n'a plus d'autre famille que son cousin Bev qui accepte de l'accueillir dans son ranch. Dans le train qui la conduit au Texas, Letty fait la connaissance de Wirt Roddy, un rancher qui la trouble et qui l'effraie en lui dessinant un tableau bien sombre de la vie texane. Arrivée chez son cousin, Letty est chargée de s'occuper des quatre enfants, mais comprend bien vite que la femme de son cousin ne l'aime guère. Cora est une vraie fille de l'Ouest, courageuse, passionnée et intrépide, qui s'agace de cette jeune cousine qui a peur de tout. Elle va la pousser dans un mariage non désiré avec un cow-boy du voisinage...
Quel âpre roman que celui-ci ! On est bien loins de l'Ouest idéalisé d'Edward Abbey, on est plutôt dans la mythologie sombre du western à la John Ford : une terre aride à perte de vue, des cactus pour seule végétation, un soleil ennemi qui brûle et dessèche et, surtout, un vent omniprésent, brusque et lancinant, qui recouvre de sable tout ce qui vit. La jeune Letty, qui a grandi dans les collines fleuries de Virginie, n'est pas du tout faite pour cette vie rude, sans confort et sans fioriture. Elle est d'ailleurs bien agaçante cette jeune fille, qui se lamente sur son passé, sa Virginie perdue, son piano et sa vieille nounou noire. Très tournée vers elle-même, elle est incapable de s'intéresser réellement à ce qui l'entoure. Elle ne rêve que de fuite, alors que le soleil se fait plus ardent, la sécheresse plus intense, décimant le troupeau, épuisant les hommes, poussant cette jeune femme au bord de la folie. Le vent et l'ennui vont faire de cette jeune femme une héroïne tragique.
Ce roman, publié en 1925, fit scandale tant il donnait une image sombre du Texas. Mais Dorothy Scarborough savait de quoi elle parlait, puisqu'elle y était née. Malgré quelques longueurs (notamment quand Letty, à chaque saison qui passe, se plonge dans des descriptions interminables de la nature en Virginie), ce roman se lit en apnée totale, emportant le lecteur dans le tourbillon de cette nature dévastatrice.
Traduit de l'américain par Pascale Voilley.
Phebus Libretto, 2012. - 296 p.