La jeune fille suppliciée sur une étagère - Akira Yoshimura
Deux récits dans ce tout petit livre au titre intrigant : deux récits qui ont pour thème central la mort ; deux récits qui m'ont laissée pareillement perplexe...
Dans le premier qui donne son titre au recueil, une jeune fille de seize ans vient de mourir, mais reste consciente de tout ce qui se passe autour d'elle. Elle voit donc deux hommes emporter son cercueil puisque ses parents, très pauvres, ont vendu son corps à l'hôpital. Dans une morgue froide et déserte, cette jeune fille va donc être consciencieusement dépiautée par deux hommes dénués d'émotion mais non de concupiscence, avant de servir aux travaux pratiques des étudiants en médecine.
Ames sensibles s'abstenir ! Cette histoire m'a fait faire des cauchemars tellement j'ai eu l'impression d'être à la place de cette jeune fille. Akira Yoshimura a un style très pur, dénué de tout artifice : pas de voyeurisme, pas de sensiblerie, pas de jugement moral. Mais je me suis demandée ce que cette histoire voulait dire. Le corps après la mort n'est-il qu'une matière inerte ? Alors, pourquoi avoir donné à cette jeune fille une telle conscience de tout ce qui se passe. Peut-être justement pour que le lecteur apprivoise l'idée qu'un jour son corps cessera de lui appartenir pour devenir un simple objet.
Le second récit est encore plus mystérieux. Enfants, Sone et Eichi étaient voisins et jouaient souvent dans un cimetière, où ils ont un jour trouvé une femme pendue. Puis le père de Sone est mort tragiquement et Sone a déménagé. Dix ans plus tard, les deux amis se retrouvent à l'université. Sone est devenu pilleur de cimetières et toute sa vie tourne autour de la mort (si je puis dire...). La mort plane sur ce récit comme une présence obsédante, attendue ou redoutée. Mais la fin ouverte laisse le lecteur complètement désemparé. Où l'auteur veut-il nous amener ? Je ne l'ai pas compris...
Traduit du japonais par Rose-Marie Makino-Fayolle.
Actes Sud / Babel, 2002. ? 142 p.