Trois femmes puissantes - Marie Ndiaye
Rentrée littéraire 2009
Une fois n'est pas coutume, voici un roman dont je ne sais pas trop comment parler, tant il m'a laissée perplexe. D'ailleurs, ce n'est pas tout à fait un roman, mais l'assemblage de trois histoires, trois histoires de femmes dont je n'ai pas bien compris en quoi elles étaient puissantes...
Trois histoires, donc, de couples, de familles, et surtout d'immigration entre la France et l'Afrique, immigration plus ou moins réussie, plus ou moins choisie, plus ou moins fantasmée ou idéalisée. Et à ce niveau, chacune de ces histoires nous fait descendre un degré dans le désenchantement : de la réussite à la désillusion, et du renoncement à l'avilissement et à la mort. Ni Norah, brillante avocate qui se pisse dessus en retrouvant un père autoritaire perdu de vue depuis des années, ni Fanta, dont la terne vie nous est racontée "en creux" par un mari veule et lâche, n'auront su me toucher. Quant à Khady Demba, il faudrait être une pierre pour ne pas être émue par un destin qui confine au tragique du début à la fin. C'est la seule, pourtant, esclave, rejetée, abusée, dont on ait l'impression qu'elle se tienne debout.
« Et elle ressentit alors si pleinement le fait indiscutable que la maigre fillette farouche et valeureuse qui discutait âprement le prix du mulet, et la femme qu’elle était maintenant, qui suivait un étranger vers un rivage semblable, constituaient une seule et même personne au destin cohérent et unique, qu’elle en fut émue, satisfaite, comblée, et que ses yeux la picotèrent, et qu’elle en oublia l’incertitude de sa situation ou plutôt que cette précarité cessa de lui paraître aussi grave rapportée à l’éclat exaltant d’une telle vérité. »
Quant au style de Marie Ndiaye, précis, analytique et instropectif, qui fouille le moindre recoin de la conscience humaine, s'il est plaisant à faible dose (cinquante pages) il se révèle insupportable sur le long terme. J'ai tenté de lire ce livre couchée, assise ou debout et je me suis immanquablement endormie... Du coup, je me demande si tout le battage médiatique autour de ce roman n'est pas lié davantage à un excès de zèle politiquement correct à l'égard du thème (femme + immigration + Afrique) qu'à son contenu réel. En ce qui me concerne, s'il mérite un prix, c'est celui du meilleur somnifère de l'année (c'est une insomniaque qui vous parle), ce qui explique que je m'y sois accrochée jusqu'au bout : j'avais la certitude que j'allais dormir à poings fermés au bout de trente lignes...
Cathulu, Lily et Fashion ont aimé. Esmeraldae est plus réservée.
Gallimard, 2009. - 317 p.