Du côté de Castle Rock - Alice Munro
Rentrée littéraire 2009

L’histoire commence avec William Laidlaw, surnommé Will O’Phaup, habitant de la peu riante vallée d’Ettrick, un endroit sans « aucun avantage », et personnage quasi-mythique pour ses prouesses à la course et ses relations avec les êtres surnaturels. La famille Laidlaw appartient à l’église presbytérienne, religion stricte et sévère régie par la crainte de Dieu. Tous les membres de la famille ont pourtant un certain don pour se faire remarquer soit par leurs dons de conteurs soit par leurs dons de comiques. Ils ont une autre particularité : ils ont grandi dans un pays où l’école était obligatoire et donc ils savaient tous lire et écrire. Nombreux d’entre eux écriront un journal ou des mémoires.
C’est en 1818 que la famille Laidlaw embarque pour le Nouveau Monde et après un bref séjour dans la ville de Québec décide de s’installer en Ontario. Commence une vie rude et difficile : on défriche la forêt et on construit une cabane en rondins. La famille mène une vie stricte, dans le respect de la religion protestante. Il semble que tout le potentiel aventureux de la famille se soit épuisée dans la traversée de l’Atlantique.
« Alors, comment concevaient-ils l’existence ? Je crois qu’ils la concevaient surtout comme un rituel. Saisonnier et inflexible, très semblable aux tâches ménagères. Essayer de gagner plus d’argent pour améliorer son statut ou que la vie devienne plus facile devait leur paraître peu convenable. »
La seconde partie du livre porte davantage sur la vie d’Alice Munro elle-même : ses parents, son enfance, son école, ses premières amours, son mariage… Se dessine le portrait d’une jeune femme secrète et indépendante, pleine d’une farouche énergie.
Cette histoire échappe à tous les genres : ni roman, ni mémoires, ni autobiographie, et pourtant un mélange de tout ça, avec des extraits de lettres et de journaux intimes mêlés à des passages fictionnels. Alice Munro nouvelliste trace un récit non linéaire qui avance par anecdotes successives. Elle a une très jolie plume, ses phrases coulent toutes seules, et elle fait preuve d’une grande finesse psychologique qui nous rend tous ses ancêtres à la fois proches et familiers. Avec ce livre atypique, elle nous convie à un très joli voyage.
Traduit de l’anglais (Canada) par Jacqueline Huet et Jean-Pierre Carasso.
L’Olivier, 2009. – 342 p.