Olivier Adam - Falaises
Un soir, un homme accompagné de ses deux fils va chercher son épouse, qui sort d’un hôpital psychiatrique où elle a séjourné plusieurs semaines. Puis il emmène toute la famille à Etretat pour quelques jours de vacances. Une nuit, la mère se suicide en se jetant du haut de la falaise. Après ce décès, toute la famille plonge dans une nuit glaciale. Vingt ans après, le plus jeune fils retourne sur les lieux du drame pour interroger le passé et tâcher de comprendre.
Je n’ai pas du tout aimé ce livre. Dès les premières lignes, j’ai détesté le style de l’auteur : froid, précis et minutieux. J’ai été gênée par cette histoire qui dérive entre présent et passé : beaucoup de retours en arrière, parfois dans des époques différentes. Je déteste ce parti pris de citer des personnages qui n’ont pas encore été présentés au lecteur. Exemple page 71 : « Durant de nombreux mois après la mort de Léa, j’avais renoncé à toute activité ». Qui est Léa ? Il faudra attendre la page 152 pour le savoir.
Mais surtout je n’ai vu dans ce roman qu’une accumulation de listes et une liste de clichés, tant dans le style (« j’avais l’impression que le moindre geste brusque pouvait la faire se briser comme du cristal sur le marbre ») que dans l’histoire. Depuis le portrait de la mère qui s’ennuie, coincée dans sa vie de femme au foyer, en passant par l’adolescence qui se traîne dans une banlieue lugubre entre alcool, drogue, sexe et musique, jusqu’à la vie du narrateur dans une chambre de bonne parisienne entre un voisin serbe orthodoxe qui picole, un voisin russe serveur dans un restaurant (on se croirait dans un roman de Nina Berberova !), une voisine espagnole et paranoïaque, et la fille du propriétaire (la fameuse Léa) dont la grand-mère est (bien entendu, comment eut-il pu en être autrement ? ) morte à Auschwitz.
Et que de malheurs dans la vie de ce jeune homme : après le suicide de la mère, le père devient haineux : haine du bruit, du mouvement, de la jeunesse, de l’étranger,... de la vie, quoi. Ses fils, qui le craignent, passent leur temps ensemble sans pour autant se parler beaucoup. Il y a les copains : Nicolas, qui se tire une balle dans la bouche à seize ans, Lorette qui devient anorexique. Alors, plus tard, les garçons fuient le foyer familial : Antoine devient marin et fait le tour du monde (quelle imagination !), Olivier atterrit à Paris où il devient alcoolique, écrit des romans, tombe amoureux. De Léa, qui se suicide dans sa baignoire. Pas de chance.
Le mystère n’est pas qu’Olivier ait réussi à survivre mais qu’il ait réussi à rencontrer une fille normale (ni alcoolo, ni anorexique, ni suicidaire) qui va le porter à bout de bras pour lui permettre de vivre enfin à nouveau. Donc la vie d’Olivier est brisé à la mort de sa mère et c’est une autre femme qui lui redonne le goût de la vie, vingt ans plus tard…
Ce roman est avant tout un roman sur l’incommunicabilité. Un livre sans dialogue quasiment puisque personne ne se parle. Le père ne parle pas avec ses fils, se contentant de leur crier après, les deux frères ne se parlent pas, ils boivent avec leurs copains en écoutant de la musique mais sans se parler, ils baisent avec leurs copines mais sans leur parler. Personne ne sait rien de personne. Da sa mère, Olivier dit qu’il n’a jamais rien su ; de son père, il dit qu’il n’a jamais rien su, de Lorette, sa première petite amie, qu’il ne savait rien. Rien non plus de Léa et de son désespoir. Quant à Claire, le femme de sa vie, ce n’est qu’une silhouette, à peine esquissée.
Une bien noire vision de notre monde moderne.
Editions de l’Olivier, 2005. – 207 p.