La chambre aux échos - Richard Powers
Par une nuit d’hiver, sur une route déserte du Nebraska, le

« Je ne suis Personne mais ce Soir sur la North Line Dieu me conduit jusqu’à toi pour que Tu puisses Vivre et ramener quelqu’un d’autre.»
Puis il tombe dans le coma. Sa sœur Karin se précipite à son chevet, abandonnant tout derrière elle : travail, maison et petit ami. Pour l’amour de son frère elle revient dans la ville de son enfance qu’elle déteste et qu’elle a toujours voulu fuir. Pendant des semaines, elle va guetter le réveil de son frère. Mais quand celui-ci, enfin, sort de son coma, il ne la reconnaît plus. Ou, plus exactement, il refuse d’admettre que cette femme à son chevet est sa sœur. Il est persuadé qu’elle est une usurpatrice. C’est le syndrome de Capgras. Désespérée, Karin fait appel à un célèbre neurologue, Weber, pour aider son frère.
Contrairement à ce que ce résumé pourrait laisser penser, ce roman est extrêmement complexe, car il aborde un domaine complexe, celui du « moi » : ce moi auquel je crois est-il celui que les autres voit ? Pendant des pages et des pages le lecteur assiste à la lente désintégration du moi de Mark Schluter et c’est très éprouvant pour les nerfs. Le roman porte très bien son titre : au contact de Mark et de sa maladie, son entourage perd peu à peu les pédales. Karin et Weber vont se désintégrer à leur tour. Et le lecteur aussi. Mark devient complètement paranoïaque, persuadé que son accident et tout ce qui s’en est suivi est le centre d’un vaste complot. Et on ne peut s’empêcher de penser que ce roman est une fable allégorique sur l’état actuel de l’Amérique :
« Nous croyons avoir accès à nos états intérieurs, mais toute la neurologie nous enseigne que ce n’est pas le cas. Nous nous figurons être une nation unifiée et souveraine. La neurologie fait apparaître que nous sommes en réalité des chefs d’état aveugles, barricadés dans leurs suites présidentielles, à l’écoute d’une petite poignée de conseillers triés sur le volet, tandis que le pays chancelle, voué aux mobilisations ad hoc… »
L’action se déroule dans l’ouest profond des Etats-Unis, le grand désert américain, où la vie n’a pas vraiment changé depuis des siècles, toujours rythmée (mais pour combien de temps ?) par le passage saisonnier des grues. Et de l’autre côté du pays, il y a New-York et le 11 septembre, les rumeurs de la guerre en Irak et la peur du terrorisme : une Amérique qui se cherche un bouc émissaire alors que sa nature est en train de mourir…
En résumé, ce roman est passionnant mais je l’ai trouvé très long (et très lent). N’eut été le merveilleux style si limpide de Richard Powers et la promesse de la résolution de l’énigme du billet mystérieux, je ne sais pas si je serais arrivée au bout…
Les billets de Sylvie - Bookomaton - Keisha - Clochette - Orchidée - Amanda - Cuné
Traduit de l’américain par Jean-Yves Pellegrin.
Le Cherche Midi, 2008. – 471 p.