Toujours prêt, Jeeves ? - P.G. Wodehouse
Depuis que j’ai découvert l’univers so british et si finement drôle de P.G.Wodehouse , je ne manque pas une occasion de lire l’un de ses romans. Son héros récurrent Bertam Wooster (Bertie pour les intimes) est un jeune dandy londonien, pas très futé mais très fortuné. Et quel est le complément indispensable d’un jeune gentleman riche et élégant ? Un valet de pieds. Celui de Bertie, Jeeves, est un modèle du genre : stylé, discret, efficace. Il est, en outre, beaucoup plus intelligent et cultivé que son maître, n’hésitant pas à citer Shakespeare chaque fois que l’occasion se présente. Mais ce qui est du plus haut comique dans ce couple improbable, c’est que le vrai maître c’est le valet.
Bertie vient justement de profiter des congés annuels de Jeeves pour acquérir un élément décoratif que son valet réprouve : une moustache. Et cette moustache déclenche l’admiration de Mademoiselle Florence Craye, une ex-petite amie, actuellement fiancée avec le prétentieux G. D’Arcy Cheesewright. (Oui, vous avez bien lu : ce personnage dont l’auteur nous dit qu’il a une « tête de potiron » porte le prénom de D’Arcy, ce qui, sous une autre plume que celle de Wodehouse pourrait passer pour un crime de lèse-Jane Austen et valoir à son auteur le bannissement à perpétuité de nos bibliothèques !) Donc, Bertie se trouve d’un seul coup dans une position fort délicate, car l’affreux Cheesewright est non seulement très jaloux, mais aussi très costaud. Et c’est le moment que choisit la Tante Dahlia pour faire appel à son cher neveu Bertie pour l’aider à résoudre un problème très délicat…
Vous l’aurez peut-être compris : dans les histoires de Wodehouse l’intrigue importe peu, elle est souvent fort légère et uniquement prétexte à mettre en scène des situations burlesques et farfelues. Tout le sel de ce roman tient dans les dialogues brillants et caustiques, et dans les personnages hauts en couleur, depuis le sanguin Cheesewright jusqu’à la Tante Dahlia, forte femme à la voix de stentor, en passant par l’Oncle Tom qui déteste tous les invités que sa femme lui impose, ou encore la belle Florence, une intellectuelle en quête de mari. On ne s’ennuie pas une seconde, on se demande en tremblant comment ce pauvre Bertie va se tirer vivant du guêpier dans lequel il est s’est fourré, quand l’inimitable Jeeves arrive à point nommé pour dénouer d’un coup de baguette magique une situation apparemment inextricable. En un mot comme en cent : j’adore !
Traduit de l’anglais par Anne-Marie Bouloch.
Editions La Découverte, 2005. – 247 p.