L'odeur - Radhika Jha

Publié le par Papillon

C’est peu de dire que j’ai été déçue par ce livre ! Et ma déception est strictement proportionnelle à la joie que je me faisait de lire ce roman indien qui a été comparé au Parfum de Süskind. A mon avis, le critique qui a osé ce rapprochement hasardeux (et dont je tairai le nom par pure bonté d’âme) n’a pas lu le bouquin, parce que comparer Radhika Jha à Patrick Süskind revient à peu près à faire de Marc Lévy l’égal de John Irving, autant dire une ineptie, une hérésie et un scandale ! Et pourtant cette histoire commençait plutôt bien…

Lîla, une jeune fille d’origine indienne, est née et a grandi au Kenya. Le jour où son père est tué lors d’une émeute, la famille doit s’exiler. Alors que la mère choisit d’aller vivre en Angleterre avec ses fils, Lîla est confiée à la garde de son oncle, qui vit à Paris. La jeune fille, qui se sent abandonnée, débarque donc dans une famille inconnue et dans un pays dont elle ne connaît même pas la langue. Elle a beaucoup de mal à s’intégrer à sa nouvelle famille. Mais sa tante entreprend de lui apprendre à cuisiner, et Lîla découvre qu’elle a un odorat très sensible, qui lui confère un talent particulier pour marier les épices et exalter les mets indiens. Et là, le lecteur se lèche d’avance les babines à l’idée de la belle histoire de cuisine, de cuisinière et de mets délicats que l’on va lui raconter. Et ben non ! Le lecteur va rester langue pendante et babines ruisselantes pendant les quatre cents pages qui restent !

Parce que l’auteur à un don très singulier, qui consiste à fuir toute idée digne d’intérêt qui viendrait à surgir sous sa plume, en lui tournant résolument le dos pour emprunter un de ces chemins balisés, dans lequel elle caracole gaiement, n’épargnant à son lecteur aucun cliché, aucune banalité et aucune platitude. L’histoire avance ainsi par virages successifs faisant du roman une sorte d’animal informe et sans structure. Lîla va ainsi renoncer à une carrière de cuisinière en se fâchant avec sa tante pour vivre quelques péripéties aussi banales qu’ennuyeuses. Et l’odeur, me direz-vous ? Elle apparaît quand on s’y attend le moins, nous réservant une ou deux belles pages, pour disparaître aussi brutalement. Et quand je vous aurez dit que la fadeur du style n’a d’égale que le manque de relief des personnages et la niaiserie des dialogues, vous me demanderez sans doute comment j’ai pu arriver au bout de cette indigeste pâtisserie pseudo-indienne. Ne voyez là qu’un exemple de mon inoxydable optimisme ou de mon incommensurable masochisme. Et aussi un peu de pitié pour l’éditeur, Picquier, qui avait jusqu’à présent toute mon estime et dont je me demande encore pour quelle raison il a cru bon d’ajouter à son catalogue ce roman inodore et incolore.


Traduit de l’anglais (Inde) par Dominique Vitalyos.
Picquier poche, 2005. – 448 p.

Publié dans Littérature asiatique

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L
<br /> <br /> je suis désolée de vous avoir blessée à ce point...<br /> <br /> <br /> toutes mes excuses<br /> <br /> <br /> <br />
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L
<br /> <br /> Bonjour<br /> <br /> <br /> Je viens de lire votre critique concernant le roman de Radhika Jha :"l'odeur" et j'avoue que les bras m'en tombent...<br /> <br /> <br /> le "parfum" que vous évoquez est certes un beau livre ,classique ,conventionnel et de belle facture...<br /> <br /> <br /> "L'odeur" est d'un tout autre registre,pour moi ,la forme se hisse à la hauteur du propos ,on n'est plus dans le lisse ou l'esthétisant ...certes , le lecteur peut etre rebuté par cette humanité<br /> exubérante et déshinibée d'un quand à soi tout occidental, je comprends que cela puisse mettre mal à l'aise si l'on n'a pas accès à cette perception ,mais de là à accuser ce roman d'etre un<br /> mauvais livre... quel mépris et quel orgueil...<br /> <br /> <br /> Les synesthésies que l'auteur décrit sont souvent le fait d'artistes ou de ceux que l'on nomme pudiquement "des surdoués". J'ai moi meme de telles perceptions ,j'ai eu l'impression de ne rien<br /> avoir lu d'aussi subtil et de profond de cette sémiotique si particulière qu'elle conduit à une réorganisation de sa vision du monde et mène à une "saisie analogique" qui visiblement vous a<br /> échappée... <br /> <br /> <br /> C'est à mon avis plus désolant pour vous que pour l'auteur.<br /> <br /> <br /> Bien à vous<br /> <br /> <br /> Laurence Devaux<br /> <br /> <br /> <br />
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P
<br /> <br /> Bonjour,<br /> <br /> <br /> Je n'étais probablement pas assez intelligente pour saisir toute la saveur de ce roman, tout comme je ne comprends rien à votre commentaire pseudo-intello.<br /> <br /> <br /> <br />
C
<br /> <br /> J'ai aussi été très déçue par ce livre! Effectivement, après une début prometteur, on quitte le monde des hindous à Paris pour partir dans une aventure banale et grotesque où une jeune indienne<br /> sans passeport ni argent et parlant à peine le français se met comme par magie à fréquenter le tout Paris, à coucher avec des grands businessmen, à briller par son talent dans une agence de<br /> communication, à fasciner tout le monde par son charme et son intelligence extraordinaire! Un mélange entre Barbara Cartland et d'Amour, Gloire et Beauté. <br /> <br /> <br />  <br /> <br /> <br />  <br /> <br /> <br /> <br />
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A
<br /> <br /> Je n'ai pas<br /> lu Smell mais je trouve le deuxième roman de Radhika Jha  Lanterns On Their Horns intéressant pour son tableau de l'Inde entre passé et futur où le futur n'est pas forcement<br /> et toujours l'option la meilleure.<br /> <br /> <br /> Avec un editing plus radical, le livre aurait pu<br /> devenir merveilleux comme le livre de Glen Peters Mrs D'Silva's Detective Instincts and the Shaltan Of Calcutta Parthian, 2009 que je recommande<br /> vivement.<br /> Adelia<br /> <br /> <br /> <br />
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C
Moi je ne suis pas d'accord. D'une part je voudrais dire que la comparaison avec le Parfum s'attache à souligner l'art de la description des odeurs ( que manie subtilement Radhika Jha) car personnellement j'ai eu l'impression de sentir réellement chaque effluves décrites. Et je voudrais ensuite dire aux personnes qui suite à cette critique ont décidé de ne finalement pas lire le bouquin, que c'est une belle erreur, et que c'est bien dommage de s'en tenir à une telle critique.
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P
<br /> Si tu as fait un billet, je serai ravie de le mettre en lien, pour donner un contrepoint.<br /> <br /> <br />
S
Héhé, et voilà comment je ne vais finalement pas acheter ce bouquin qui avait pourtant l'air un peu tentant sur Ebay.. Merci internet !Je m'en vais d'ailleurs farfouiller un peu plus dans votre blog pour voir si vous en avez des bons à recommander sur l'Inde... :-P
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S
Et bien moi je l'ai mais pas encore lu! Mais je garde un petit espoir malgré cette critique car je n'ai pas aimé Le parfum.
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C
j'avais failli l'acheter et puis je l'avais reposé car je n'aimais pas la typographie : toute petite et serrée, à m'en donner mal aux yeux. Pour plus tard, avais-je pensé, on verra...<br /> Là, après ta critique... 1°- je suis soulagée  2°- j'ai fait des économies  3°- je vais passer à autre chose ! <br /> :-)
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C
Le mien aussi, de banquier, est content!! Bon, en tout cas tu n'y vas pas par 4 chemins, c'est très bien, ça évite une déception et des dépenses inutiles...
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P
En voilà un, au moins qui ne fera pas grandir ta PAL ;-)
H
Merci de m'éviter ce livre que j'avais intuitivement envie de lire....
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P
C'est ton banquier qui va être content :-DDD