Purge - Sofi Oksanen
1992. Après cinquante ans d’occupation soviétique, l’Estonie vient d’accéder à l’indépendance. Mais la situation est encore instable et la vieille Aliide, qui craint les voleurs et les mafieux, vit recluse dans sa ferme. Pourtant quand elle trouve une jeune femme cachée dans son jardin, elle accepte de l’héberger. Zara est effrayée, épuisée et ressemble à une bête traquée. Aliide lui offre un repas, des vêtements et un lit, sans rien perdre de sa méfiance. Les deux femmes s’observent, se jaugent, chacune cherchant à savoir qui est l’autre. Puis Zara se décide à montrer à Aliide une vieille photo jaunie, une vieille photo qui fait resurgir un passé douloureux et obscur…
A travers le destin de ces deux femmes, c’est tout l’histoire récente de l’Estonie que l’auteure nous raconte. Et quelle histoire ! Occupation allemande, occupation russe, tortures et déportations, dictature communiste. La vieille Aliide, à l’image de cette histoire torturée, est une femme complexe qui n’a connu que le pire. L’histoire de sa famille est intimement liée à l’histoire nationale. Aliide a grandi dans l’ombre d’une sœur belle, gaie, talentueuse et admirée. Quand cette sœur épouse l’homme qu’elle convoite en secret, c’est le début d’une descente aux enfers pour Aliide. Cinquante ans plus tard, Zara, sans le savoir, lui offre une forme de rédemption.
A l’heure où l’Estonie vient d’entrer dans la zone euro, j’ai trouvé passionnant de découvrir l’histoire de ce petit et discret pays. La double histoire d’Aliide et de Zara est racontée par des retours en arrière successifs et j’ai aimé ce dévoilement progressif d’une histoire de plus en plus tragique. On éprouve de la compassion pour Zara, une de ces victimes du miroir aux alouettes de l’Ouest et on ne parvient pas totalement à détester Aliide à la fois victime et bourreau du régime communiste.
Traduit du finnois par Sébastien Cagnoli.
Le Livre de poche, 2012. - 430 p.