Montecristo - Martin Suter
Rentrée littéraire 2015
"Vous n'avez jamais fait l'expérience, monsieur Brand, du fait que la vérité cause plus de dommages que le mensonge ?"
Longtemps, Jonas Brand a espéré devenir cinéaste et tourner Montecristo, une adaptation moderne du célèbre roman d'Alexandre Dumas. N'étant jamais parvenu à trouver le moindre financement pour ce projet, il s'est reconverti en vidéoreporter et tourne des sujets people pour la télé suisse, des trucs faciles, peu embarrassants et pas très créatifs. Ce jour-là, il va pourtant vivre deux événements qui vont changer sa vie. Il est d'abord témoin dans l'Intercity de Bâle d'un "incident voyageur", un terme utilisé par toutes les compagnies ferroviaires du monde pour désigner le suicide d'un voyageur sur la voie. Le suicidé en question est un brillant trader de la General Confederate Bank of Switzerland. Le soir même, après une soirée un peu trop arrosée, Jonas (qui fait sa comptabilité avec une précision suisse) réalise qu'il est en possession de deux billets de cents francs suisses qui portent exactement les mêmes numéros de série. L'un deux serait-il faux ? Son conseiller financier lui confirme rapidement qu'il est absolument impossible que deux billets portent le même numéro, mais que ses deux billets sont pourtant parfaitement authentiques. Jonas décide de mener son enquête.
Oubliez la quatrième de couverture qui vous promet un thriller haletant, cette histoire n'est ni l'un ni l'autre, j'ai même trouvé le début un peu languissant. C'est une enquête journalistique dans le milieu très secret, très feutré et un rien mafieux des grandes banques suisses. On y visite la société qui imprime les billets de banque, on y rencontre un trader qui a un peu trop spéculé sur l'argent de son employeur (comme un goût de déjà vu), un journaliste économique banni d'antenne pour "raisons esthétiques", on y apprend la recette du curry d'agneau, et aussi (mais est-ce vraiment une surprise ?) qu'une banque est prête à tout pour ne pas couler et, surtout, que la finance est aujourd'hui tellement mondialisée qu'une banque qui a des difficultés de trésorerie peut entraîner toute l'économie mondiale dans sa chute.
Autant j'avais aimé le gentleman cambrioleur de Martin Suter, autant son reporter m'a laissée de marbre et cette histoire m'a semblée à la fois fade et cousue de fil blanc : trop de découvertes faciles, de témoins bavards et d'heureux hasards. La pirouette finale, totalement improbable mais qui confirme que l'être humain est bien peu de chose dans le monde de la finance, m'a achevée.
Traduit de l'allemand par Olivier Mannoni.
Christian Bourgois éditeur, 2015. - 338 p.