Nos fantastiques années fric - Dominique Manotti
Voici un polar qui nous ramène vingt-cinq ans en arrière, dans les clinquantes années quatre-vingt. 1985 : le premier septennat de Mitterrand s’achève péniblement, et le PS est au bord de perdre les élections de 1986. Quatre français sont otages au Liban depuis des mois, mais la clé de leur libération est à Téhéran. Pour inverser la tendance électorale, François Bornand, conseiller privé de Mitterrand et patron de la cellule antiterroriste de l’Elysée, décide de négocier avec les iraniens et de leur envoyer une cargaison d’armes, au mépris de l’embargo, et avec la promesse d’une grosse commission à la clé. Mais cette vente d’armes n’est pas du goût de tout le monde et l’avion qui les transporte explose en plein vol. Le lendemain, une call-girl de luxe est retrouvée assassinée sur un parking, une jeune fliquette débutante mais persévérante mène l’enquête.
Il y avait bien longtemps que je n’avais pas lu de polar politique, depuis que j’ai plus ou moins abandonné James Ellroy, en fait. Ce n’est pas le genre que je préfère. Il n’est pas question ici de savoir qui a fait quoi, mais de montrer les dessous d’un système. Et les dessous de la politique, c’est rarement plaisant. On a un peu l’impression de fouiller dans de vieilles poubelles et ça pue. Corruption à tous les étages, manipulations et mensonges en tous genres, sexe et drogues à gogo, sans oublier le cynisme :
« Vous vous croyez à gauche, vous ? Regardez-vous. Il n’y a que votre montre-bracelet et votre chevalière en or qui soient à gauche chez vous. Et moi ? Qu’est-ce que ça veut dire ; à gauche pour moi, vous pouvez me le dire ? Moi, je suis au pouvoir, c’est tout. »
J’ai donc eu un peu de mal à entrer dans cette histoire complexe aux très nombreux personnages, mais j'aime beaucoup le style de Dominique Manotti : très efficace, bref, sans fioritures. Son roman est très rythmé, sans temps morts, et nous présente tour à tour le point de vue de la plupart des protagonistes, ce qui permet de voir que chacun dans cette histoire a quelque chose à perdre. L'auteur mêle assez finement d’un côté les hautes sphères de la politique, et de l’autre une jeune beurette devenue flic par hasard pour qui cette enquête est un défi. Au final, ce roman s'achève comme un vrai thriller, et ce n’est pas désagréable de voir un de ces puissants (très pourri, quand même...) tomber de son piédestal, à cause d’un grain de sable. Ce roman achève de me convaincre que la cupidité humaine est bien le pire des maux sur terre.
L'avis de : Choco
Rivages, 2001. – 187 p.