Nation Pigalle - Anne Plantagenet
Le quartier Pigalle à Paris : quartier louche et interlope, quartier du sexe, dominé par le Moulin Rouge et bordé par les sex-shops et les boutiques de lingerie sexy, quartier en plein bouleversement, de moins en moins bohême et de plus en plus bourgeois, où les hôtels de passe laissent la place aux crèches et aux boutiques chics. C'est là que, par une froide journée d'hiver, une vieille femme met le feu à son appartement. Ce n'est pas un accident mais un geste désespéré pour fuir une vie de solitude et de tristesse. Cet incendie, par ses conséquences, va bouleverser tout l'entourage de la vieille dame, à commencer par son fils. Timothée, la cinquantaine, producteur au bord de la faillite, mari infidèle et père absent, est sur le point de quitter sa femme pour vivre avec sa maîtresse. L'état de sa mère, qui se retrouve dans le coma, va l'obliger à sursoir (une fois de plus) à ce projet et à faire le bilan de sa vie. La voisine Louisa, quant à elle, va remettre en question toute sa vie, à cause de l'odeur persistante de fumée qui règne dans l'immeuble, au grand désarroi de son mari.
Ce roman choral, où prennent tour à tour la parole les six principaux protagonistes, m'a beaucoup fait pensé à The Slap (la vulgarité en moins), en ce sens que c'est un roman très contemporain, qui trace un portrait sans concession du monde dans lequel nous vivons. C'est le roman des années Sarkozy, plus exactement le roman de l'année 2010. Rien n'y manque : de la grippe A à l'expulsion des Roms, du débat sur l'identité nationale à la Coupe du Monde de football, de l'éruption du volcan islandais à la réforme des retraites.
"Il y avait certainement des alternatives à la France d'aujourd'hui, à la politique sécuritaire à l'expulsion d'étrangers l'explosion de sans-papiers le racisme le triomphe de l'arrivisme de l'argent de la pensée unique du calcul de la bêtise des inégalités des faux rebelles."
L'idée n'était pas mauvaise, mais franchement les états d'âme de ces bobos parisiens (traductrice, romancier, journaliste,...) m'ont très vite énervée. Je les ai vus comme des nantis qui se plaignent du prix des loyers, tout en acceptant de payer une fortune pour des tomates exotiques, qui se donnent bonne conscience en prenant la défense des étrangers expulsés tout en râlant envers les SDF qui squattent leurs pas de porte et contre les fumeurs qui ont envahi les trottoirs depuis la loi anti-tabac. C'est le portrait d'une France riche qui râle mais ne se rebelle pas. Et quel remède à ce mal-être ? Les personnages du roman le trouveront dans le sexe, et de manière tellement glauque que j'en ai été choquée. (Je me demande si je ne deviens pas bégueule en vieillissant...)
Et j'attends toujours le bon roman du Paris d'aujourd'hui.
Stock, 2011. - 493 p.