L'annonce faite à Amber - Caroline Rebstock
Qui pourrait bien avoir intérêt à enlever Amber Masterson, jeune femme solitaire qui ne s’intéresse qu’à la vie animalière ? Et pourtant, l’agression dont vient d’être victime la jeune femme n’avait pour motif ni l’argent ni le sexe, et a donc été identifiée par la police comme une tentative avortée d’enlèvement. Peu après, Amber reçoit la visite d’un journaliste scientifique qui lui fait une surprenante révélation. La maladie dont a souffert Amber enfant n’était pas du tout bégnine, comme elle l’a toujours cru. Il s’agissait en fait d’une leucémie aigüe, dont elle n’aurait pas dû réchapper, vu les capacités de la médecine de l’époque. Mais Amber a bénéficié d’une guérison spontanée due à une particularité rarissime de son sang. Son dossier médical venant d’être rendu public, Amber est soudain devenu un objet de convoitise.
Alors que Richard Powers exposait dans son dernier roman les enjeux de la thérapie génique, Caroline Rebstock évoque ici la thérapie cellulaire, rivale de la première dans l’arsenal thérapeutique prometteur du futur. Mais ici le thème est traité sur le mode du thriller. La thérapie cellulaire est basée sur l’utilisation de cellules souches embryonnaires, cellules d’autant plus rares que l’utilisation des embryons est interdite par la plupart des pays européens. Et qui dit rare, dit cher, et donc susceptible de faire l’objet de tous les trafics illicites à but très lucratifs, raisons pour laquelle Amber est pourchassée avec autant d’acharnement. Dans sa fuite, elle se trouve confrontée tour à tour à des médecins plus ou moins ripoux, des media avides de scoop et de sensationnalisme, des religieux en manque de miracle et des industriels avides et cupides ; mais aussi un gentil commissaire très efficace qu’elle va traiter bien mal…
Le charme de ce thriller super efficace, c’est la personnalité tout à fait originale de son héroïne. Depuis toujours, Amber se méfie du genre humain et a développé un profond intérêt pour tout ce qui est animal. Elle est soigneur au zoo de Vincennes et sa longue observation des animaux sauvages la pousse à se comporter en société comme si elle était elle-même un animal. Elle a développé une sensibilité animale, des réflexes animaux, et cette connaissance va lui donner un certain avantage pendant la traque dont elle est la proie. Cette particularité donne aussi une tonalité très particulière à la narration, tendue, nerveuse, très analytique.
« Les parties les plus serrées se jouent contre ses propres démons. Chez moi, c’est l’imagination, onctueuse et sournoise. Connaissant mes penchants, je me prépare, avec l’intime conviction que je vais devoir rester sur les chemins balisés des faits avérés et des certitudes. Me défendre contre les hypothèses tentantes, les raccourcis pavés de cohérences douteuses. Se souvenir que sa pente naturelle entraîne l’homme baigné d’ignorance à relier entre eux le plus grand nombre de faits possibles, manie déductive, frénésie interprétative. »
Un premier roman étonnant et vraiment réussi.
Odile Jacob, 2011. – 318 p.