On s'est déjà vu quelque part ? - Nuala O'Faolain
Nuala O’Faolain vit à Dublin, elle est productrice de télévision, journaliste et écrivain. Elle a longtemps écrit des chroniques pour l’Irish Times. C’est à l’occasion de la publication de ces chroniques sous formes de livre, que son éditeur lui a demandé d’écrire une introduction. C’est ainsi que sont nées ces mémoires.
Nuala O’Faolain est née à Dublin pendant la seconde guerre mondiale. Elle a grandi dans une Irlande où la vie était strictement cadrée par l’église catholique. Sa famille était vaguement bohême : un père journaliste, séducteur, volage, toujours absent, peu préoccupé de sa famille ; une mère très amoureuse, toujours enceinte, incapable d’assumer tous ses enfants (quatorze grossesses, neuf enfants), ne tardant pas à sombrer dans l’alcoolisme pour surmonter l’absence de son mari.
De ses parents, Nuala O’Faolain dit qu’elle n’a rien eu, faisant référence à la tendresse, à l’amour et à un certain sentiment de sécurité. Pourtant de sa mère, elle tient l’amour des livres et la littérature a toujours eu rôle important dans sa vie ; et de son père elle a hérité un certain talent pour écrire. Mais son enfance a été marquée de façon obsédante par le manque d’argent et les disputes de ses parents. A l’adolescence, c’est l’obsession du sexe qui la ronge, ce qui lui vaut d’être envoyée en pension chez les sœurs pour lui éviter « de faire des bêtises ». Avec du recul, elle raconte que ce fut la première chance de sa vie, même si ce furent des années difficiles.
La chance qu’elle a eu finalement, c’est d’échapper au destin qui était prévu pour elle : le mariage, un tas d’enfants, une vie domestique sans ouverture sur le monde autre que la messe du dimanche. Au lieu de quoi, elle a fait des études universitaires et fréquenté les milieux littéraires et artistiques des années 70 et 80. Elle a eu des tas d’amis, d’amants et un métier passionnant qui lui a permis de rencontrer des centaines de gens différents et de voyager partout dans le monde.
J’ai trouvé ce livre assez mal écrit, brouillon et fouillis. On dirait qu’il a été écrit d’une traite, sans relecture. Les différentes époques se mélangent souvent. Nuala O’Faolain a fréquenté les milieux littéraires de Dublin et de Londres et cite un tas de noms d’écrivains et d’artistes qui me sont totalement inconnus, ce qui rend la lecture parfois fastidieuse. Elle a eu beaucoup d’amis et raconte beaucoup d’anecdotes, dans lesquelles je me suis souvent perdue. Mais toutes ces réserves étant faites, ce livre reste un témoignage passionnant, et souvent poignant, sur la vie dans l’Irlande de la seconde moitié du vingtième siècle.
La vie dans cette Irlande est un prison dont seule l’Eglise catholique détient la clé. Le mariage est l’unique destin, pour les hommes comme pour les femmes, il n’existe aucune contraception, et tout ce qui touche à la sexualité représente un tabou énorme. Une grande partie de la population irlandaise est confinée dans une ignorance du monde, soigneusement entretenue par les autorités politiques et religieuses. Les femmes sont convaincues que l’amour est leur avenir, que leur bonheur personnel ne peut venir que d’un homme, et se précipitent donc tête baissée dans le piège du mariage, qui fait justement leur perte. La seule fuite possible, elles la trouvent dans les pubs et l’alcool. On comprend, dès lors, quelle libération ont apporté les années 70 dans un tel marasme.
Traduit de l'anglais (Irlande) par Julia Schmidt, et Valérie Lermite
10/18 – 2005 – 313 p.