Monsieur Kraus et la politique - Gonçalo M. Tavares
"Un politicien ne lit pas les livres, dans le meilleur des cas il lit les titres. Avec les gens, il fait pareil."
Tout ce que vous toujours voulu savoir sur les dessous de la politique (sans oser le demander), Monsieur Kraus vous le révèle dans ses chroniques complètement surréalistes. Il y met en scène un dirigeant, le Chef, inculte, prétentieux, égocentrique et arrogant (toute resssemblance avec des personnages existants n'est peut-être pas totalement fortuite...), et ses deux Assesseurs, aussi obséquieux que serviles. Le principal talent du Chef est de violer le langage pour plier la réalité à sa volonté. On découvre ainsi comment écrire une loi qui ne sert à rien, manipuler l'opinion, faire en sorte que les sondages soient toujours favorables, faire mentir les chiffres, créer sans cesse de l'agitation pour donner l'illusion de l'action...
" - Mon concept de frontières, répéta le Chef, se définit par les lignes qui délimitent l'écran de la télévision. Tout ce qui apparaît en dehors de l'écran ne reléve pas de notre pays, c'est déjà au-delà de la frontière."
Le monde de Tavarès, c'est le règne de l'absurde et du nonsense, lieu d'une satire acide et comique du monde politique. C'est à la fois savoureux, et un peu effrayant de justesse.
" - Qui dort et qui court ? Pas toujours facile de faire la distinction, dit Monsieur Kraus.
Mettre des pantoufles ou des chaussures d'athlétisme. Telles sont les deux options. Les politiciens les plus habiles sont ceux qui, même lorsqu'ils enfilent des pantoufles, donnent l'impression de se préparer intensivement à une éprteuve d'athlétisme.
- On pourra considérer, murmura Kraus, qu'une telle illusion d'optique résulte soit de la propagande, soit de la myopie de l'observateur."
Ce volume est le troisième d'une série, O Bairro ("Le quartier"), dont chaque héros est le double d'un écrivain célébre. Karl Kraus était un satiriste autrichien contemporain de Zweig.
L'avis de Lignes de fuite
Traduit du portugais par Dominique Nédellec, postface d'Alberto Menguel.
Viviane Hamy, 2009. - 138 p.