Les saisons de la nuit - Colum McCann
New York, 1916. Tous les jours, des hommes descendent dans les profondeurs de la terre, pour creuser ce qui deviendra le métro reliant Manhattan à Brooklyn. Ces hommes viennent de partout : Irlande, Italie, Pologne… Nathan Walker, lui, arrive de Géorgie, et ce cul de basse fosse semble être un des rares endroits de la ville où la couleur de sa peau ne pose pas de problème. Douze heures par jour, ces hommes font un travail de forçat dans la chaleur, la poussière et l’obscurité. Un accident spectaculaire va faire de quatre de ces hommes des amis pour la vie.
1991. Le métro de New York est achevé depuis bien longtemps et ses tunnels sont devenus le dernier refuge des exclus de la société : les clochards, les sans abri, ces hommes et ces femmes qui ont un jour largué famille, boulot, maison et jusqu’à leur nom. Ils se surnomment Treefrog, Faraday ou Papa Love, et leur vie est un combat quotidien contre la faim, le froid, la violence et la solitude. Ils ne sont pourtant pas dénués de talent : l’un est équilibriste, l’autre un génie de l’électricité, un troisième peint des fresques sur les murs, mais ce qui domine leur vie, c’est le manque.
Ce roman au style limpide tisse deux histoires qui vont finir par se rejoindre. D’un côté, on suit sur trois générations l’histoire de la famille de Nathan Walker, l’amoureux des tunnels, qui épouse par amour une jeune fille blanche avec laquelle il traverse ce que le XXe siècle a fait de pire : le racisme, la guerre, la violence, la drogue et la misère. D’un autre côté, on suit le quotidien difficile de Treefrog et on découvre comment ce jeune homme qui semblait avoir tout ce qui peut rendre un homme heureux, a pu un jour complètement basculer.
A travers Nathan et Treefrog, Colum McCann nous montre l’envers du décor : l’envers de la ville de New York, ceux qui l’ont construite, creuseurs de tunnels ou bâtisseurs de gratte-ciel, et ceux qu’elle a rejetés. Mais il n’y a dans cette histoire ni voyeurisme, ni pathétique, ni apitoiement, mais beaucoup d’humanité.
Pour moi, ce roman est un chef d’œuvre et il serait vraiment dommage de passer à côté.
Un grand merci à Loulou qui m'a envoyé ce livre pour le Swap'n follies.
Traduit de l’anglais par Marie-Claude Peugeot. 10/18, 1999. – 321 p.