Le polygame solitaire - Brady Udall
« Quand vous avez à choisir entre un chemin facile et un chemin difficile, choisissez le difficile et tout ira bien. »
Rien ne prédestinait Golden Richards à devenir polygame. Entre un père chercheur d'or toujours absent, qui finira par ne plus revenir, et une mère dépressive entretenant son rôle de femme abandonnée, l'enfance de Golden fut triste et solitaire. A l'adolescence, c'est presque par hasard qu'il retrouve son père en Utah, dans la peau d'un milliardaire mormon. Vingt-cinq ans plus tard, Golden est devenu à son tour, et quasiment à son insu, un pilier de la communauté mormone fondamentaliste de la Virgin Valley. Il est le mari essouflé de quatre épouses, le père épuisé de vingt-huit enfants et le propriétaire dépassé de trois maisons (et demie). Patron d'une entreprise de construction, Golden croule sous les soucis domestiques qu'il tente de fuir en acceptant un chantier loin de chez lui. Il fait croire à tout le monde qu'il construit une maison de retraite, alors qu'en fait il s'agit d'un bordel. Ce mensonge va être le premier d'une longue série qui va mener Golden bien loin...
Brady Udall, qui a grandi dans une famille de mormons, s'est inspiré de son arrière grand-père pour imaginer le personnage de Golden, dont il a fait un héros éminemment sympathique (quoique un peu tête à claques par moments...) Il est touchant parce qu'il est aussi fort physiquement que doux de caractère, et on comprend vite qu'il ne dirige rien dans sa pléthorique famille. Ce sont ses femmes qui font la loi, surtout l'épouse n°1. Golden, lui, est complètement dépassé, parce que la famille d'un polygame, c'est une famille nombreuse puissance dix. Et la famille Richards est en pleine désintégration entre rivalités féminines et rebellions enfantines. Mais le ton du roman balance sans cesse entre drame et comédie. Il y a quelques scènes d'anthologie dans cette histoire : un chewing-gum baladeur et une autruche têtue. Il y a aussi un petit garçon qui rêve d'une maman pour lui tout seul, et une épouse qui voudrait voir son mari plus souvent. Et au final, la famille c'est compliqué, certes, mais on a encore rien trouvé de mieux.
Encore un excellent roman de l'excellente collection "Terres d'Amérique", dirigée par Francis Geffard.
Traduit de l'américain par Michel Lederer.
Albin Michel, 2011. - 735 p.