Fleur et sang - François Valléjo
Rentrée littéraire 2014
"Il fait le vide dans sa tête, dans ce thorax d'où le sang est évacué vers la machine. Il voit ses mains comme détachées de sa pensée, et fermes, et précises, elles courent le long du cœur, s'insinuent, décortiquent, de la broderie comme il aime."
Au XVIIe siècle, sous le règne de Louis XIV, Maître Urbain Delatour est chirurgien et apothicaire dans un petit village de Touraine, et a pour apprenti son fils aîné qui doit un jour lui succéder. Parmi ses patients il a tous les paysans du coin, mais aussi le seigneur du lieu, Monsieur de Montchevreüil, qui souffre de la "maladie de pierre".
De nos jours, Etienne Delatour est chirurgien cardiaque quelque part en Touraine. Alors qu'il était interne il a eu une brève aventure avec Isabelle Saint-Aubin, jeune femme solitaire et un rien sauvage, qui a refusé de l'épouser. Quinze ans plus tard, elle lui propose un poste de chef du service de cardiologie dans l'hôpital parisien que son père dirige.
Deux fils narratifs se croisent dans ce roman pour bâtir deux histoires en miroir : deux médecins, deux filles célibataires qui vivent encore avec leur père à trente-cinq ans, toutes deux boiteuses, deux réussites spectaculaires,…
Pendant que Monsieur de Montchevreüil court les villes d'eau pour soigner ses douloureux calculs rénaux, son médecin prend de plus d'ascendant sur la population du village, allant jusqu'à affronter ouvertement Isabelle de Montchevreüil, créature étrange qui s'habille en homme et vit à cheval. Non seulement il soigne et guérit, mais il attribue les baux, récolte les impôts et arrange les mariages, ce qui ne va pas tarder à agacer le curé d'abord, le gouverneur ensuite.
Quant à Etienne Delatour, il reprend ses amours avec Irène de Saint-Aubin, sur le mode intermittent et effectue une brillante carrière. Jusqu'au jour où des lettres calomnieuses attirent l'attention de l'administration sur certains dysfonctionnements de son service.
Grandeur et décadence.
Le problème de ce roman binaire, c'est que si l'histoire ancienne fonctionne très bien (belle atmosphère, vraie tension dramatique, personnages étoffés, fin totalement surprenante), même si l'imitation du style XVIIe m'a quelquefois parue un peu ampoulée, l'histoire contemporaine ne fonctionne pas du tout. Les motivations des personnages ne sont jamais très claires, le scénario pas très crédible s'étire en longueur. Je n'ai pas bien compris le pourquoi de ce double récit boiteux, d'autant que l'imitation d'un récit dans l'autre poussée à l'extrême finit par agacer. Quel dommage : Maître Urbain Delatour se suffisait à lui-même.
C'est Mior qui m'a donné envie (elle y voit une histoire de psycho-généalogie qui m'a totalement échappée)
Editions Viviane Hamy, 2014. - 259 p.