Le rêve de Machiavel - Christophe Bataille
Rentrée litéraire 2008
J’ai découvert Christophe Bataille il y a deux ans, avec son Quartier général du bruit qui m’avait complètement séduite. Dans son dernier opus, il s’attaque à un autre genre : le roman historique.
1527 : la peste ravage Florence. En soudoyant un garde, Machiavel parvient à fuir le ville mourante et assiégée. Il fuit vers une autre ville fortifiée qui lui apparaît comme un refuge. Mais la ville se protège, il doit subir une minutieuse inspection avant d’être admis dans ses murs. Il y trouve une auberge désertée par ses clients, qui lui procure un lit et une hôtesse accommodante. Il se met à errer dans les rues de la ville habitée par la peur de la contagion :
« C’est une vie parfaite, invivable, et qui a un dieu puissant : la peur. La peur de dormir, la peur de se réveiller, la peur de l’eau qu’on boit ou qu’on ne boit pas, la peur de l’air vagabond, la peur des vêtements qu’on porte, la peur de manger. La peur de sortir. La peur de rester seul. La peur de rencontrer une femme. La peur de l’aimer. La peur de la peur. La peur de ce mot flottant et court, rêche, innommable. C’est le retour aux crânes. »
La première partie est fascinante, sorte de long poème en prose au style cru et heurté sur le thème de la mort, de la peur et de la solitude. Machiavel, qui a déjà connu à la fois pouvoir, gloire et richesse, exil et tortures, va se dépouiller peu à peu de tout, dans ce monde déshumanisé où bien et mal n’existent plus, où l’homme est prêt à tout juste pour survivre. Il découvre que ni la richesse ni la culture n’ont le moindre pouvoir face au destin le plus trivial de l’être humain. Il va alors trouver sa véritable humanité :
« Il pleure en marchant. Si l’on arrache ma peau, que verra-t-on ? Ma vie en vérité : les glaires, les sucs, les boyaux noircis, le cœur épuisé, la cervelle. On verra ce sac de bassesse qu’est Machiavel, le poète, le conseiller, le nom, et avec lui, dans cette île spirituelle gainée de peau, tout homme vivant. »
L’auteur intervient alors dans son récit pour expliquer le propos de son livre, né d’un texte de Machiavel racontant la peste de Florence et sa rencontre avec une jeune fille à la beauté troublante. A partir de là, j’ai trouvé que la narration, toute poétique qu’elle soit, commençait à tourner en rond et ces dernières pages qui font vivre à Machiavel sa dernière histoire d’amour dans un monde en pleine déliquescence, ne m’ont pas vraiment touchée car trop saturées de sang, de larmes et de pus.
Une lecture éprouvante pour les nerfs.
Lily adore, Essel est réservée.
Grasset, 2008. – 218 p.
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La biographie d'un autre poète maudit (à peine plus vieux) : Je, François Villon de Jean Teulé.